Physiologie du genou

STATIQUE DU GENOU :

La statique du genou s'apprécie cliniquement par un examen minutieux et par l'imagerie notamment radiologique. Chez le patient debout de face, les faces internes des genoux et les deux malléoles internes doivent se toucher se qui définit la normo axation. De profil, l'axe de la cuisse doit être le même que celui du tibia. La hauteur respective des deux jambes peut être mesurée au niveau du creux poplité zone située à l'arrière du genou.

Axe fémur/tibia

Le genou présente un valgus physiologique d'environ 3°. Cette angulation, spécifique à la bipédie exclusive reporte l'axe des forces verticales sur le plateau tibial interne, contrairement aux grands singes dont le varus très accentué déplace cet axe vers le condyle fémoral interne.

Rotation de la tubérosité tibiale antérieure

La tubérosité tibiale antérieure est légèrement oblique en dehors. Cette disposition, associée à un genu valgum tend à basculer la rotule vers la zone externe du genou voir la subluxer. La tomodensitométrie ou scanner permet de mesurer précisément l'extériorisation de cette apophyse tibiale antérieure. La technique consiste à mesurer la distance entre la base de la tubérosité et la projection de son sommet sur une ligne frontale passant par les plateaux tibiaux. Chez le sujet normal, cette distance est inférieure à 15 mm.

Angle condylo-trochléen

Cet angle est formé par l'intersection des lignes reliant les extrémités des trochlées d'une part, et les bases condyliennes. Il apprécie la différence de hauteur des deux berges trochléennes. Il doit être supérieur à 3°.

Angle trochléen

L'angle trochléen apprécie l'ouverture de la trochlée, mesuré à 15° de flexion de la jambe. Il est normalement égal ou inférieur à 130°.

DYNAMIQUE DU GENOU :

La fonction essentielle du genou est la flexion extension. Cette limitation des libertés articulaires a été acquise au cours de l'évolution. En effet, chez la majorité des animaux de l'ère secondaire, le genou primitif présentait une articulation proche de celle du coude, c'est à dire, capable de réaliser des mouvements de rotation très amples. La perte de cette fonction visible, dès le jurassique dans la grande majorité des espèces terrestre, a pour origine vraisemblable la nécessité de stabilité de la principale articulation portante.  A la grande mobilité de la ceinture scapulaire et du membre supérieur s'opposent, au cours de l'évolution, la fixité des os du bassin et la limitation des degrés de liberté des articulations du membre inférieur. Cette stabilité a été en partie réalisée par un abaissement de la tête du péroné. Ce dernier, qui participait jadis à l'articulation du genou, au même titre que le radius au coude, n'a conservé qu'une articulation tibiale destinée à la rotation, laissant à l'articulation fémoro-tibiale, la fonction exclusive de flexion/extension.

Articulation fémoro-tibiale

L'articulation fémoro-tibiale moderne présente des mouvements de :

  • flexion/extension 130° à 150°
  • rotation externe/interne < 8°
  • latéralité < 5°

Lors de la flexion, le tibia est l'objet d'une rotation interne et inversement lors de l'extension. Ce mouvement est en rapport avec les différents axes des courbures condyliennes et glénoïdes. Il donne aux muscles de la loge interne de la cuisse, une force plus importante. Pendant la flexion, les condyles fémoraux glissent en avant et roulent en arrière. Ce dernier mouvement tend à pousser en arrière, les ménisques rapprochant ainsi les cornes postérieures. L'extension est limitée par la rotule, les ligaments croisés et les ligaments latéraux. La flexion est stoppée par le tendon rotulien et les ailerons rotuliens ainsi que par la rencontre de la jambe sur la cuisse. Les mouvements de rotation sont nuls lors de l'extension, du fait de la tension des ligaments croisés et latéraux. Ils n'existent que lors de la flexion de la jambe. Les ligaments croisés freinent la rotation interne, les ligaments latéraux, la rotation externe. Les mouvements de varus rotation interne sont limités par le ligament croisé antérieur, la bandelette de Maissiat et le biceps. Les mouvements de valgus rotation externe sont limités par le ligament croisé antérieur, les muscles ischio-jambiers et le muscle poplité.

Articulation fémoro-patellaire

La rotule coulisse de haut en bas dans la trochlée fémorale. En extension, le sujet étant debout, la rotule se trouve positionnée au dessus de cette trochlée. Lors de la flexion, la rotule s'abaisse pour glisser entre les berges de la trochlée. La position en valgus du genou est à l'origine d'une pression importante de la facette externe de la rotule sur la berge trochléenne externe. Ce phénomène est le résultat de la bipédie exclusive et de la valgisation du membre inférieur, au cours de l‘évolution. Inversement tous les grands vertébrés du secondaire, du tertiaire et du quaternaire, présentent un condyle fémoral interne plus développé que l'externe. Ce phénomène apparaît moins marqué chez les grands reptiles bipèdes (iguanodon, tyrannosaure…), que chez les quadripèdes (tricératops, diplodocus…).

Chez tous les grands singes bipèdes sporadiques, la marche en varus/flexion provoque un effet identique, c'est à dire, une pression de la rotule sur le côté interne du genou, à l'origine d'une symétrie des condyles et des facettes rotuliennes ou d'un aplatissement de la face articulaire rotulienne qui peut perdre sa crête mousse.

Des travaux récents menés par l'auteur ont montré que la morphologie du genou moderne était en rapport avec la marche bipède. En effet, chez des enfants n'ayant marché pour différentes raisons neurologiques, la rotule apparaît lenticulaire et les condyles fémoraux de même hauteur. Cette observation confirme le caractère adaptatif et non pas génétique, du modelé du genou par la station debout et la marche. C'est l'appui de la facette externe de la rotule sur la berge externe de la trochlée qui est à l'origine de l'asymétrie des facettes rotuliennes, du développement en épaisseur de la rotule et de l'hypertrophie du condyle fémoral externe. Ce développement de la rotule et du fémur intervient certainement très tôt dans l'enfance, au moment du passage de la position en varus (- de 4 ans) à la verticalisation de la jambe (5 à 7 ans). L'apparition du valgus physiologique, au-delà de cet âge, n'est certainement pour rien dans le modelé du genou.

Articulation péronéo-tibiale supérieure

L'articulation péronéo-tibiale supérieure est très peu mobile. Elle constitue une survivance de l'ancienne articulation du genou. Cette articulation présente des mouvements antéro-postérieurs de faible amplitude, et de peu d'intérêt physiologique. Elle participe avec la péronéo-tibiale inférieure et la fémoro-tibiale aux quelques degrés de rotation de la jambe. Lors des mouvements de flexion dorsale du pied, la tête du péroné glisse légèrement vers le haut et se place en rotation interne. Le mouvement inverse est observé lors de la flexion plantaire du pied. Cette correspondance aux mouvements de la cheville rend cette articulation vulnérable aux lésions macro et micro-traumatiques de la cheville.

TROUBLES DE LA STATIQUE

Le genou peut présenter des anomalies dans le plan sagittal (recurvatum ou flessum) et dans le plan frontal (varus ou valgus). Seules, ces deux dernières anomalies sont d'une très grande fréquence.

Répartition en % des varus et des valgus en fonction du sexe.

 
   NI Varus Valgum
Homme 30 60 10
Femme 45 35 20


Le sexe masculin présente une grande fréquence de genu varum, au point de se demander si ce signe sexuel secondaire ne correspond pas à une « normalité » masculine. Les femmes plus volontiers en genu valgum présentent néanmoins 35 % de varus.

Genu valgum

Etiologie

Le genu valgum est une déviation « en dehors » de la jambe à partir du genou, jambes en « X ». Cette déformation est plus fréquente chez la fille.

Diagnostic

Examen clinique

Le genu valgum peut être apprécié cliniquement en mesurant la distance entre les malléoles internes, les cuisses étant serrées ou par téléradiographie. Physiologiquement, la distance intermalléolaire ne doit pas dépasser trois centimètres et l'axe « fémur/tibia » trois degrés (valeurs mesurées moins deux degrés de déviation interne physiologique). Le risque inhérent à cette déformation est de voir apparaître à long terme, une arthrose du genou. Cette anomalie sera donc prise en compte dès l'enfance.

Examen radiologique

La radiographie de face, les pieds dans l'axe de la jambe permet de mesurer précisément l'écart entre les malléoles.

Attitude pratique

Bien que gênante pour un certain nombre d'activités sportives (football, athlétisme, saut de haies…), cette déformation ne contre-indique aucune activité physique.

Si la déformation est importante, une rééducation par attelle pourra être entreprise chez le jeune enfant.

Genu Varum

Etiologie

Cette anomalie plus fréquente chez le garçon que chez la jeune fille se caractérise par une déviation de la jambe « en dedans » par rapport à l'axe de la cuisse.

Diagnostic

Examen clinique

L'importance du genu varum peut être appréciée cliniquement par la mesure de la distance entre les faces internes des deux genoux, les malléoles étant jointes (normalement inférieure à 1 cm).

Examen radiologique

Le genu varum s'apprécie radiologiquement en mesurant l'angle formé par les axes du fémur et du tibia (valeur normalement inférieure à trois degrés). Les risques à distance de voir apparaître une gonarthrose nécessitent, dans les cas sévères, une prise en charge et surveillance dès l'enfance.

Attitude pratique

Si la déformation est minime (inférieure à 3 cm, et/ou inférieure à 5 degrés), l'examinateur se contentera d'instaurer un suivi annuel de l'enfant, pour s'assurer que l'angulation ne s'aggrave pas. Il n'existe dans ce cas, aucune contre-indication à la pratique sportive.

Quand les déformations sont plus importantes, il sera nécessaire de se référer à l'avis d'un chirurgien spécialiste en orthopédie infantile.

Une seule activité sportive ose un réel problème, le football ; une double interaction peut en effet être définie vis à vis de ce sport. D'une part, le genu varum favorise la pratique du football (meilleure maîtrise du ballon), d'autre part, le football tend à aggraver la déformation (notamment lors de la pratique des dribbles). Pour cette pratique, une surveillance pluriannuelle sera donc mise en place. L'équitation, longtemps accusée de provoquer des jambes type « Lucky Luke » (genu varum, genu flessum, rotation externe du pied) ne peut plus être mise en cause. Les nouvelles techniques de monte ne favorisent plus cette anomalie.

Article rédigé par le Dr David CATTAN Chirurgien Spécialiste du Genou (Paris)